Le débat politique est traversé par un discours dominant à chaque époque. Deux exemples tirés du passé permettent de juger à quel point le phénomène médiatique finit par se suffir à lui-même.
Il y a 25 ans, la gauche au pouvoir a réduit la sidérurgie française à sa plus simple expression. La droite aux affaires aurait fait la même chose tant il était acquis que la sidérurgie européenne n'avait plus d'avenir, que l'acier serait moins utile à l'activité humaine, et les surcapacités françaises dans ce domaine trop coûteuses pour être maintenues. Pourtant, aujourd'hui, la demande d'acier explose ; Mittal a racheté Arcelor ; et l'on se demande comment on a pu laisser faire ce désastre industriel.
Autre exemple que celui de l'agriculture : la presse nous a rebattu les oreilles des surplus alimentaires stockés par l'Union européenne. Combien de fois ne nous a-t-on pas asséné ces hangars frigorifiques débordant de viande, de lait, de beurre ? Qui ne s'est pas indigné de cette agriculture européenne - surtout française - subventionnée pour produire des excédents ? Et aujourd'hui, voilà que l'on apprend que les surplus européens ont disparu, et que le prix des matières premières agricoles augmentent même sous l'effet d'un resserrement de leur offre.
L'expérience enseigne donc que les engouements idéologiques passagers pour tel ou tel discours doivent être pesés à l'aune de quelques décennies... et des enjeux fondamentaux d'un pays : disposer d'une industrie puissante et d'une agriculture autosuffisante a toujours été un atout, et le demeure - en dépit de la "virtualisation" croissante de l'économie mondiale.