L'élection de Nicolas Sarkozy à la présidence de la République fait remonter à la surface médiatique cette tumeur particulière de la vie politique française, les rapports entre pouvoir politique et média. Les craintes, les soupçons, les rumeurs même, sur une éventuelle collusion entre le nouveau pouvoir politique et les grands patrons de presse sont une excellente chose : le combat pour la liberté de la presse doit être vigoureux et sans relâche.
Les arguments des nouveaux zélotes de la liberté d'opinion seraient d'autant plus percutants s'il ne dataient pas que de quelques semaines. Il a fallu quatorze ans pour apprendre que François Mitterrand avait été un membre éminent du régime de Vichy, presque dix pour qu'on révèle au grand public l'existence de sa fille Mazarine. Et pendant toutes ces longues années, qu'on fait les défenseurs actuels de la liberté de la presse ? Quels articles a-t-on lu sur le sujet ? Bien au contraire, on nous abreuvait de reportages sur le couple - officiel - entre François et Danièle Mitterrand, de comptes rendus annuels sur l'ascension de la roche de Solutré...
Les médias vivent une proximité inquiétante avec le pouvoir politique en France ? Quel scoop ! Quelle découverte ! Qui ne s'est pas interrogé un jour ou l'autre sur le reportage consacré à un voiture, un produit, les performances de telle ou telle entreprise ? Qui n'a pas eu des soupçons de connivence lors d'une interview de complaisance ? Journalistes et hommes politiques se fréquentent, partent en vacances ensemble, vivent ensemble, se marient, c'est ainsi depuis des lustres et toujours aussi préoccupant. La dénonciation - légitime et salutaire - de cet état de fait serait bien plus crédible si elle ne s'apparentait pas à un petit coup de pouce donné aux copains flagellés par le suffrage universel.