Contre toute attente, et à rebours de ses prises de position durant l'entre-deux tours des précédentes campagnes pour l'élection présidentielle, François Bayrou a appelé à voter François Hollande, même s'il l'a fait de manière détournée en indiquant que c'était là un choix personnel qui n'emportait pas consigne de vote pour ses électeurs. Tout le monde a bien compris pourtant que tel était son choix et que le faire savoir revenait à donner un signe à ceux qui avaient voté pour lui au premier tour.
L'influence de cette prise de position sur son électorat est certainement extrêmement faible : l'ensemble des enquêtes d'opinion montre que ses électeurs se sont déjà répartis entre les deux candidats de second tour.
En revanche, le choix de François Bayrou peut avoir un effet indirect sur deux autres électorats fondamentaux pour le résultat final : ceux de Marine Le Pen et de Jean-Luc Mélanchon.
D'ores et déjà ce dernier a fait savoir qu'il "tient à l'oeil l'ami de la règle d'or" (Le Monde, daté du 5 mai 2012). Le ralliement de Bayrou à Hollande fait suite aux positions sur l'immigration exprimées par ce dernier, notamment lors du débat télévisé avec Sarkozy, et contribue à déplacer légèrement vers la droite le centre de gravité électoral du candidat socialiste. Ce glissement peut-être susceptible d'indisposer une partie de l'électorat de Jean-Luc Mélanchon, et coaguler une part des reports de ses voix sur François Hollande.
Inversement, les propos de François Bayrou à l'encontre de Nicolas Sarkozy pourraient valoir à ce dernier "brevet" de véritable droitisation aux yeux d'une partie de l'électorat de premier tour de Marine Le Pen qui tient toujours grief au candidat sortant de n'avoir pas mis en oeuvre la politique musclée de droite qu'il escomptait de lui après l'élection présidentielle de 2007.
Ce dernier avatar d'une campagne électorale qui n'aura pas ménagé les surprises s'inscrit dans le contexte du resserrement continu des courbes d'intentions de vote de second tour entre Hollande et Sarkozy.
Il est désormais très vraisemblable que l'élection sera serrée, peut-être même très serrée. La possibilité de réélection de Nicolas Sarkozy devient de même une réalité tangible.